Depuis 2015, le 30 mars est la journée mondiale des troubles bipolaires (JMTB), en hommage à la date de naissance de Vincent van Gogh (le 30 mars 1853) qui était lui-même atteint de cette pathologie qui touche 1 à 2% de la population.

Les enjeux de cette journée mondiale sont nombreux: lutter contre la stigmatisation et changer le regard que l’on peut avoir sur ce trouble qui est une maladie comme les autres. L’accès aux soins n’est pas toujours facile et il faut réduire le délai entre les premières manifestations du trouble et la mise en place d’un traitement adapté.

Le but de cette journée est aussi d’informer un large public et de faire reculer la méconnaissance de cette maladie.

Le 30 mars, le Funambule a organisé un événement dans le cadre de la Journée mondiale des Troubles bipolaires. Au programme : une séance plénière sur le rétablissement, cinq ateliers thématiques et une séance de clôture.
Deux vidéos sont disponibles, de la séance plénière (durée 48’51”) et de clôture (durée 22’02’’).
C’est au total une centaine de personnes qui ont participé à l’événement.

Interviews des intervenants et des animateurs:

Session plénière - le thème était : "Le rétablissement, c'est possible"

Intervenantes : Pascale Fransolet et Martina Nothacker, pair-aidantes à la clinique Sans Souci

Modératrice : Franca

Pascale et Martina, toutes deux paires-aidantes à la Clinique Sans Souci, ont présenté la publication « Mon carnet de rétablissement. Outils et réflexions », dont elles sont coautrices.

Pascale  : «  Le Funambule et moi, c’est toute une histoire. C’était très important pour moi d’être présente, à cette journée. Je suis très attentive aux personnes en souffrance, dont celles qui vivent avec le trouble bipolaire. J’ai accepté l’invitation de présenter « Mon carnet de rétablissement » car c’était une occasion de donner une visibilité à ce bel outil. Il peut vraiment aider des personnes, que ce soit des usagers, des proches, des amis. Il peut être partagé parce qu’il est conçu pour des conférences multiples. A la Clinique Sans Souci, on travaille des projets sur base de ce carnet avec des patients, ça fonctionne très bien, avec des techniques comme le collage, le dessin, la photo. Ce qui compte pour moi et pour tous les pairs-aidants, c’est de permettre aux personnes en souffrance d’avancer, petit pas par petit pas. ».

Mon carnet de rétablissement   

Atelier 1 : Vie de couple, vie de famille (relations avec un proche conjoint, parent, enfant)

 Intervenants : Jérôme, Jean-Marc et Gabriel Tala pour Similes Bruxelles

Jean-Marc  : « Les participants étaient présents, selon leur âge, à des titres divers, ils ont partagé des questions sur les conditions de leur engagement dans les relations affectives, familiales ou conjugales. Arnaud (qui fait partie de l’équipe du Funambule) et dont la compagne, Annick (également bénévole chez nous) vit avec le trouble bipolaire, a été un moteur dans les échanges au sein du groupe. Le groupe a élargi son questionnement aux premiers engagements amoureux, aux relations parents – enfants, au désir d’un engagement solide et durable en couple, etc. Les craintes partagées semblent être essentielles, que l’on soit concerné ou pas par la bipolarité. Cependant, pour les personnes confrontées au trouble bipolaire et leurs proches, ces questions se posent de manière plus aiguë. La bipolarité permet un questionnement lucide sur l’engagement, l’amour, une relation durable et authentique, l’éducation,…
Il était remarquable que les participants avaient l’habitude de parler de tous ces sujets. L’ambiance était respectueuse et tout était très fluide. ».

Ressources:
Associations actives auprès des proches :
Notre association, via les groupes de parole et l’écoute téléphonique

Similes :
A Bruxelles :
https://similes.brussels/
En Wallonie :
https://associationsimiles.org/
En Belgique francophone, pour les enfants de personnes en souffrance psychique :
https://etincelleasbl.com/
Articles :
Vie de couple :
https://www.santemagazine.fr/sante/maladies/maladies-mentales/trouble-bipolaire/couple-comment-vivre-une- relation-amoureuse-avec-un-conjoint-bipolaire-919291
Parent d’une personne bipolaire :
https://handirect.fr/troubles-bipolaires-temoignage/

 

Atelier 2 : Hygiène de vie (sommeil, alimentation, sport, médication, suivi psychothérapeutique) et ressources

Intervenantes : Annick et Cécile H

Annick  : « Notre atelier comportait deux parties, une sur les différents aspects de l’hygiène de vie (alimentation, sommeil, activités, …), l’autre sur les ressources personnelles. A ce sujet, je voudrais dire que, même si on croit qu’on n’en a pas, tout le monde a un potentiel en lui à exploiter. Chaque participant à l’atelier témoignait de son vécu et il en ressort qu’il est très difficile d’avoir des activités, surtout, de se mettre en route pour les faire. Certains ont donné des idées qui fonctionnent bien, comme écouter de la musique, écrire, mais aussi bien gérer son sommeil, qui est un élément fondamental de l’hygiène de vie. Les échanges ont été très riches, avec beaucoup de bienveillance et de respect. Cécile et moi, on était vraiment motivées par ce sujet, qui revient souvent dans les groupes de parole et qu’on n’a pas toujours l’occasion d’approfondir. On s’est bien partagé l’animation et il y avait une bonne dynamique de groupe. ».

Ressources : 
Une brochure : ici

Un outil mis au point par Annick: ici

 

Atelier 3 : Relations au travail

Intervenants : Stéphane et Cécile P

Stéphane  : « Il y avait des participants de Belgique et de France, notamment. Les réalités du monde du travail sont différentes mais il y a des points communs dans le rapport personnel à la vie professionnelle. La question qui revient souvent, c’est de dire ou pas à sa hiérarchie et ses collègues qu’on souffre de bipolarité. Celles et ceux qui choisissent de ne pas le dire doivent composer avec leurs symptômes et ils ne sont pas vraiment eux-mêmes, cela leur demande beaucoup d’énergie et génère souvent de la souffrance. Il est ressorti de l’atelier que le travail à une grande place dans notre société et dans notre identité. Pour les personnes qui perdent leur travail à cause de leur pathologie et n’en retrouvent pas, cela a un impact sur leur santé mentale et le sens qu’elles peuvent donner à leur vie. En ce qui me concerne, j’ai pu me réinsérer car je bénéficie d’un aménagement de mon temps de travail pour gérer ma fatigue. J’ai donc une pause-repos d’une demi-heure à midi et de deux jours par mois où je ne travaille pas. Cela est possible grâce à l’accord de mon employeur et à une intervention financière de l’AVIQ (agence pour une vie de qualité) pour compenser ma perte de salaire.

Cécile P.  : « L’atelier était très intéressant. Deux types de situation se présentent pour nos pairs : la peur de reprendre le travail et, pour celles et ceux qui recommencent à travailler, la crainte de parler de leur bipolarité à leur employeur. Cette crainte peut entraîner des chutes parce que la personne ne peut pas exprimer sa souffrance et parler de ses symptômes.

J’ai régulièrement des témoignages, à l’écoute téléphonique, sur les chutes dues aux exigences auxquelles le travailleur ne peut répondre, à cause de son trouble et des conséquences de la pression qu’il ressent.

Le témoignage de Stéphane m’a beaucoup touché parce qu’il a osé demander qu’on prévoie un temps de repos pendant la journée. C’est important de demander à son employeur une adaptation de ses conditions de travail parce qu’on souffre d’une maladie chronique. L’idée, c’est de dire : « Quelle aide pouvez-vous m’octroyer pour que je fonctionne au mieux de mes capacités ? ».

Ressources :
Plus d’infos sur le site de l’AVIQ : ici

Atelier 4 : Les addictions

Intervenants : Gregory et Simon Lemaire, coordinateur du Réseau Nomade

 Simon  : « C’était très enrichissant d’entendre les expériences de personnes concernées par la bipolarité et les addictions. J’ai été touché par le partage et j’ai trouvé intéressant de ne pas parler des produits addictifs mais des comportements, vis-à-vis de l’alcool, du tabac, mais aussi du coca, par exemple ou encore de l’hypersexualité. Les personnes se sont donné des conseils, il y a eu plein de messages d’espoir et les échanges m’ont même motivé à arrêter de fumer. On a en effet élargi le propos au-delà du trouble bipolaire, parce que les addictions, cela concerne beaucoup de gens même si, évidemment, couplées à une pathologie, les effets sur la santé, mentale et physique, sont démultipliés. Il a également été question de la réduction des risques, RR, c’est ce que pratique l’ASBL « Dune », à l’origine de la création du Réseau Nomade. J’ai apprécié d’animer l’atelier avec Greg, nous avions bien préparé la séance, c’est une belle collaboration avec le Funambule. ».

Ressources :
Article intéressant : https://www.hopestage.com/blog/bipolarite-et-addiction-comment-en-sortir

Greg  : « On a abordé les aspects théoriques mais surtout pratiques. Les addictions sont différentes chez chacun mais il y a une approche semblable, celle de la dépendance à une consommation. Ces addictions sont un gros problème, comme une deuxième peine, qui s’ajoute à la pathologie. A défaut d’arrêter de consommer, du tabac, de l’alcool, on peut réduire les risques et c’est toute l’utilité d’une association comme « Dune », que Simon, le coanimateur, connaît bien. J’espère que les échanges au sein du groupe ont permis une prise de conscience et que, peut-être, cela a donné un nouvel élan, un stimulus pour changer ses habitudes et réduire ses comportements addictifs. Chacun en parlait avec facilité, tout le monde était d’égal à égal. Cela m’a fait du bien à titre personnel aussi, j’ai fortement réduit ma consommation de tabac et je compte prolonger mes efforts. La collaboration avec Simon s’est très bien passée, c’est positif de travailler avec des associations partenaires. ».

Atelier 5 : La relation à la médication et au diagnostic

Intervenante : Docteur Godelieve Baetens, psychiatre

  Modératrice : Franca

Dr Baetens  : « Tout d’abord, je voudrais dire que c’était un plaisir de prendre part à cet événement parce que le Funambule occupe une place très importante dans le soutien aux personnes concernées par le trouble bipolaire. J’ai contribué modestement à donner des informations sur la maladie, pour laquelle le diagnostic reste difficile. Il y a une très grande diversité de bipolarités, autant que les patients et les phases, basses ou hautes, sont différentes d’une personne à l’autre, tant dans leur durée que dans leur intensité. Il y a des bipolarités que j’appellerais plus classiques et d’autres, atypiques, c’est-à-dire avec des cycles tout à fait irréguliers. C’est fondamental de bien expliquer le diagnostic au patient parce que cette étape va conditionner son acceptation et celle de ses proches. En ce qui concerne la médication, il faut qu’elle soit élaborée en concertation entre le psychiatre et le patient pour être vraiment adapté et bien réfléchie et pour garantir l’adhésion thérapeutique au traitement. Madame Rossi, qui animait l’atelier, m’a posé une question sur le test sanguin pour différencier la dépression unipolaire et le trouble bipolaire. Je pense qu’il est prématuré de s’exprimer sur le sujet, les résultats annoncés sont peut-être positifs (80%) mais je trouve qu’il faut que ce soit vraiment scientifiquement prouvé et intégré dans des protocoles. A mon sens, il faut être prudent car beaucoup de personnes sont dans l’attente d’une réponse quant au diagnostic et cela pourrait donner de faux espoirs. ».

L'interview de Franca, présidente du Funambule:

« J’ai été ravie par la qualité de cet événement, que nous avons préparé pendant plusieurs semaines. Merci à Arnaud ainsi qu’à tout le comité organisateur, tant les membres de l’équipe que les personnes extérieures. Merci à tous les participants, de Belgique et d’ailleurs . Pour nous, ce 30 mars, qui marque la date de naissance du peintre Vincent Van Gogh, n’aura pas été une nuit étoilée mais une journée illuminée par l’espoir et l’entraide.».

L'interview d'Arnaud, initiateur de l'évènement:

« J’ai déjà organisé des événements semblables dans d’autres ASBL et j’ai à chaque fois apprécié l’émulation créée par les échanges entre les personnes.

A la demande d’un participant à un groupe de parole en ligne, j’ai proposé au conseil d’administration d’organiser une journée pour le 30 mars. On a opté pour le virtuel car une activité en présentiel nécessite des frais importants et des infrastructures. En plus, on a des participants français à nos groupes de parole en ligne et ils n’auraient pas pu venir.

L’événement du 30 mars nécessite un gros investissement de la part des membres de l’équipe du Funambule. Tout s’est bien passé même s’il a manqué une répétition générale qui aurait permis d’éviter certaines petites techniques de couacs. Mais c’était impossible de mobiliser tous les intervenants pour ce test. J’ai assisté Christian, le coordinateur technique et j’ai également participé à l’atelier sur la vie de couple, vie de famille. Je me suis vraiment senti entouré en tant que proche d’une personne vivante avec le trouble bipolaire. Cela fait presqu’un an que je suis administrateur au Funambule et cette fonction renforce la qualité de mon activité professionnelle dans une organisation internationale. ».

L'interview de Christian, le coordinateur technique de la journée:

« J’ai d’abord fait une recherche pour choisir la plateforme la plus sécurisée, un outil qui ne soit pas une passoire, pour le dire familièrement. Nous avons opté pour Teams. J’ai organisé une mini-formation pour les personnes qui allaient animer les ateliers et les séances plénière et de clôture. J’ai aussi préparé les formulaires d’inscription, que j’ai envoyé par mail à tous les participants. On a compté une centaine de personnes au total mais il y avait plus d’inscrits. Dans l’ensemble, tout s’est bien passé même s’il y avait un peu de stress, comme par exemple, au moment où il fallait faire entrer les participants dans chaque atelier. Je m’occupais de l’enregistrement de la séance plénière, qui ouvrait la journée et, tout de suite après, je devais m’occuper d’autoriser les personnes connectées à entrer dans les ateliers.

On a eu un poblème technique avec une vidéo intégrée dans la présentation de « Mon carnet de rétablissement » et un autre qui, à posteriori, est marrant mais que, sur le moment, j’ai dû gérer : il y a eu une panne de courant chez Docteur Baetens, qui intervenait dans l’atelier diagnostic et médication. On s’est téléphoné, je lui ai expliqué comment se connecter sur son téléphone mais, le temps que tout se remette en place, des personnes se sont déconnectées, ce qui est compréhensible après une journée dense. J’ai gardé mon sang-froid jusqu’au bout, c’était important que je ne stresse pas et que j’aide du mieux que je pouvais les personnes en difficulté. ».

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